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Découvrir la nature avec nos yeux d’expert.e.s

Parce que tu te demandes qu’est-ce qui se passe dans un cocon de papillon, comment se forme une tornade et comment les plantes communiquent... L'équipe de naturalistes de GUEPE a décidé de répondre à toutes tes questions, car la nature, ce n’est pas un mystère, c’est une science! Un.e naturaliste c’est quoi? En gros, c’est un.e spécialiste dont la mission première est de vulgariser les différentes sciences de la nature.

Chaque mois, on te présente une vedette, animale, végétale ou autre (oui, oui!), en plus des sujets préférés de nos naturalistes. Reste donc bien connecté.e. On va répondre aux questions de notre lectorat (incluant les tiennes) et on va aussi te proposer des places à visiter, des actions à poser, des trucs à voir et à lire. 

On te souhaite une bonne exploration de la nature!

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Montagne
Les bonnes pratiques de randonnée en montagne

Un balado qui donne tout les conseils nécessaires pour une randonnée extraordinaire en montagne et respectueuse des écosystèmes des hauts plateaux.

LES HAUTS PLATEAUX DE CHARLEVOIX ET NOUS - Ensemble protégeons les écosystèmes 

Tu pars à la découverte de sommets montagneux? Tu attaches tes bottes pour arpenter les sentiers alpins sinueux? Prends quelques minutes pour faire le plein de conseils avant de quitter. Ton expérience sera encore plus satisfaisante, pour toi, et respectueuse pour ces écosystèmes rares et fragiles que sont les hauts plateaux

Bonne randonnée! 

Tu peux écouter cet audioguide directement dans la boîte audio ici.

Tu peux le télécharger ici. Pas certain comment ça marche? Jette un oeil ici.

Nos audioguides sont aussi disponibles sur ITunes et l’appli Apple Podcasts et optimisés pour casque d'écoute.

INFORMATIONS PRATIQUES

Durée : 12 minutes

Quand écouter : avant de partir ou lors de ta randonnée

Le projet Les hauts plateaux de Charlevoix et nous est une campagne de sensibilisation sur la fragilité des écosystèmes alpins. Grâce au soutien de plusieurs partenaires nationaux et régionaux, l’équipe de GUEPE, en concertation avec les professionnel.le.s du milieu, développe et partage différents outils de formation, d’information et de sensibilisation sur les écosystèmes fragiles des sommets. Brigades vertes en montagne, affichage sur les sentiers, balado sur les bonnes pratiques en randonnée et capsules vidéo sont à disposition des amateur.rice.s de randonnée en montagne, pour qu'ensemble, nous protégions les hauts plateaux.

 

Ça pourrait être toi!

Contenu et idéation : GUEPE

Réalisation : Paysages 

Sources images : GUEPE

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Choix du naturaliste
Le plancton et la colonne d'eau

Le plancton est loin d’être singulier! Lorsque l’on parle du plancton, on fait référence à une très grande diversité d’organismes vivants qui sont essentiels pour le maintien du fragile équilibre du vivant.

Le plancton est loin d’être singulier! (Hihihi!!! On sait que tu as compris notre jeu de mot entre la conjugaison du terme et l’exceptionnalité de ces organismes! 😅) Lorsque l’on parle du plancton, on fait référence à une très grande diversité d’organismes vivants : des organismes composés d’une seule cellule (dit unicellulaires) jusqu’à des organismes composés d’organes (dit complexes). Ces organismes ont parfois la capacité de se déplacer dans l’eau, mais ce n’est pas le cas de tous. Certains ne font qu'être en suspension dans l’eau (on appelle ça de la locomotion passive). Pour ces derniers, c’est comme flotter, mais sous l’eau, pas à la surface.

Toutefois, ce qui les unit tous, c’est qu’ils sont incapables d’aller à contre-courant! Les courants marins les entraînent et ils n’ont aucun mot à dire. Ils sont tout simplement emportés dans la même direction que l’eau.

Du p'tit phytoplancton dans une goutte d'eau de mer

Le plancton, c’est quoi?

Dans cette panoplie d’organismes, on retrouve les phytoplanctons qui sont en grande partie des algues microscopiques (mais pas que!). Ces très petits organismes, même s’ils ne sont pas tous des végétaux, ont tous la capacité de fabriquer leur nourriture grâce à la lumière du soleil. C’est ce que l’on appelle des producteurs dans la chaîne alimentaire. Ils peuvent donc faire de la photosynthèse dans leurs cellules, comme les arbres le font dans les cellules de leurs feuilles.

Du zooplancton

On retrouve aussi les zooplanctons qui sont des organismes appartenant au règne des animaux. Ils sont souvent microscopiques et doivent manger d’autres organismes vivants pour survivre. Et tout comme les espèces plus grosses, il y en a des herbivores (les Copépodes*), qui ne mangent que les producteurs (soit les phytoplanctons), et d’autres qui sont plutôt carnivores, qui mangent d’autres espèces animales.    

Une p'tite méduse ♥‿♥

L'appellation plancton inclut également les méduses**, ainsi que des larves (bébés ou jeunes) d’espèces marines comme chez les coraux et certains poissons, sans oublier les petits crustacés comme les fameux krills. Ces derniers ressemblent à de mini-crevettes et sont à la base de l’alimentation d’une grande variété d’autres espèces : zooplanctons carnivores, poissons, oiseaux, baleines***. Les krills, eux, se nourrissent de phytoplanctons et de zooplanctons herbivores.

Vivre dans la colonne d’eau

Le plancton est partout dans les milieux aquatiques, ce qui inclut la colonne d’eau (ou la zone pélagique). Cette zone, souvent oubliée dans l’imaginaire collectif, est pourtant la plus importante en termes de volume d’eau sur la planète****. Il s’agit de toute l’eau des mers et des océans qui se trouve entre la surface et les fonds marins. En moyenne, cela représente plusieurs kilomètres de profondeur. Il y a donc énormément d’espace où une espèce marine peut se retrouver uniquement entourée d’eau (loin de la surface, du fond marin et même de la côte).

Toutefois la vie dans cette colonne d’eau change selon la profondeur. Les rayons du soleil peuvent traverser la surface de l’eau et fournir de la lumière à la couche d’eau supérieur. Les organismes qui font de la photosynthèse, comme le phytoplancton, s’y retrouvent donc en grande quantité. La moitié (50 %) de l’oxygène disponible sur Terre serait produite par ces organismes dans cette couche supérieure de l’eau. Puisque la lumière est absorbée par les organismes et la matière de la couche supérieure, il y a peu de rayons qui réussissent à atteindre les couches plus profondes. Plus on descend dans la colonne, moins il y a de la lumière, jusqu’à atteindre une profondeur où tout est noir.  

Sur les côtes de l'Argentine, on peut observer des phytoplanctons à la surface de l'eau sur des centaines de kilomètres. Vus de l'espace, ils illuminent le bleu sombre de l'océan et forment des tourbillons à cause du courant. On dirait presque d'une aurore boréale aquatique.

Un voyage cyclique

Les zooplanctons peuvent se retrouver un peu partout dans cette colonne. Ceux qui sont herbivores (se nourrissant de phytoplancton) trouveront leur nourriture dans la couche supérieure, mais cela ne veut pas dire qu’ils y restent toujours. Des scientifiques ont découvert des planctons qui se promènent entre les différentes couches selon le moment de la journée. Le jour, ils sont plutôt cachés dans les couches plus sombres, en profondeur, puis ils remontent avec l’arrivée de la nuit, quand ils peuvent manger paisiblement le phytoplancton, avant de redescente avec les premières lueurs du jour.

Ce cycle journalier a un impact sur le mouvement de l’eau et la circulation les éléments nutritifs. Le déplacement du zooplancton*****, en grand groupe, brasse l’eau (on dit qu’ils font de la bioturbation), ce qui permettrait de maintenir en suspension de fines particules de matière (des éléments nutritifs, chimiques et des sédiments). Ainsi, le plancton jouerait un rôle majeur dans la présence et la distribution de cette matière le long de la colonne d’eau. Ce brassage n’est pas assez fort pour modifier des courants marins. Toutefois, son impact sur la vie marine serait comparable à l’effet du vent et des marées.

Voici un bel exemple de la variété du plancton. On peut voir dans cet échantillon du zooplancton : des copépodes (ils sont ovales avec de longues antennes), des œufs de poissons, une larve de crabe (difficile à manquer!!) et d'autres de vers marins, une daphnie presque transparente... On trouve aussi des phytoplancton, entre autres des cyanobactéries (ce qui ressemble à des cheveux) et des diatomées (les cercle et les rectangles avec du vert).

On compte dans les planctons des organismes vivants parmi les plus petits sur Terre. Il n’en demeure pas moins qu’ils ont une importance majeure dans le fragile équilibre du vivant. Ils ont une place essentielle dans la mosaïque alimentaire marine, dans la production d’oxygène, dans le brassage des eaux et même dans la séquestration du carbone******. Les nombreux bouleversements engendrés par les changements climatiques affectent aussi le plancton qui est sensible aux changements brusques de température, de salinité et d’acidité de l’eau. Il est donc important de suivre l’évolution de la situation de ces organismes afin d’avoir une image plus claire de l’état de santé de nos écosystèmes marins!  

NOTES

* Dans la série animée « Bob l’éponge », l’un des personnages est un copépode. Il s’agit de Sheldon James Plankton (ou tout simplement Plankton), le plus grand ennemi et concurrent commercial de M. Krabs.

** Certaines espèces de méduses sont considérés comme des zooplanctons toute leur vie, alors que d’autres ne seront des planctons qu’à des moments précis de leur cycle de vie. La forme libre (planctonique), que l’on associe à l’état de méduse, se reconnaît par une apparence gélatineuse en suspension dans l’eau. Et même si elles peuvent se déplacer, leur capacité de propulsion n’est pas suffisante pour contrer le courant.

*** Le krill est une source de nourriture très importante pour les plus grosses baleines de la planète, dont le rorqual bleu, la plus grosse de toutes!  

**** « Ce biome couvre approximativement 70 % de la surface de la Terre, et sa profondeur moyenne atteint près de 4000 mètres. » Campbell et Reece, Biologie, 3e édition, 2007, p.1190

***** Les zooplanctons ont différentes techniques pour bouger dans la colonne d’eau : en modifiant leur flottabilité par la présence de petites poches de gaz dans leur corps ou en changeant « leur composition ionique interne », mais aussi en se propulsant à l’aide de mini poils (des soies), par exemple.

****** Par photosynthèse, le phytoplancton emprisonne le carbone (comme les arbres) en absorbant le gaz carbone (CO2), en fabriquant du sucre (à base de carbone) et en l’utilisant. De plus, grâce à la chaîne alimentaire, ce carbone se retrouve dans de plus grands animaux (des prédateurs) et aboutit sur le fond marin à la mort de ces animaux.

Par Philippe, éducateur-naturaliste et coordonnateur des activités dans Charlevoix

Sources images : Dick (Flickr), Adriana Zingone, Domenico D'Alelio, Maria Grazia Mazzocchi, Marina Montresor, Diana Sarno, LTER-MC team, Bastian Huwer, NOAA Satellites, Jay Nadeau, Chris Lindensmith, Jody W. Deming, Vicente I. Fernandez, and Roman Stocker. Image courtesy of David Liittschwager (courtesy of David Liittschwager)

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Vedette du mois
Le krill, un héros caché

« Krill ». Ce mot, je suis certaine que tu l’as déjà entendu, (probablement dans Trouver Nemo). Mais sais-tu vraiment ce qu’est le krill? Sans plus attendre, on te présente ce petit, mais ô combien important habitant des océans!

« Krill ». Ce mot, je suis certaine que tu l’as déjà entendu, (probablement dans Trouver Nemo 😉). Mais sais-tu vraiment ce qu’est le krill? Sans plus attendre, mouille-toi le corps, les bras et la nuque, et plonge avec nous dans l’eau glacée du Saint-Laurent (brrrrrrr), partons ensemble à la découverte du krill…  

Faisant partie de l’ordre des Euphausiacés, le krill est un tout petit (voir minuscule) crustacé* qui vit dans tous les océans du monde. Il existe environ 80 espèces de krill, mais les plus connues sont le krill atlantique, Meganyctiphanes norvegica, et le krill antarctique, Euphausia superba. Le krill atlantique se retrouve dans les eaux tempérées et tropicales alors que le krill antarctique préfère les eaux froides.

Les superbes couleurs de Euphausia superba

Qui sont-ils?

Les Euphausiacés adultes vivent à environ 200 m de profondeur, dans les premières couches des océans. Quant aux larves, elles se développent entre 700 m et 2000 m de profondeur! Ils vivent en grands groupes que l’on appelle « essaims », si grands que certains peuvent atteindre jusqu’à 450 km2 avec un poids estimé à 2 millions de tonnes! Ici, on parle d’une superficie quasi équivalente à la ville de La Malbaie, de Québec ou même de Lévis! Les essaims restent en profondeur la journée pour se cacher des prédateurs et remontent près de la surface la nuit.  

Un rôle de choix

La plupart des espèces de krill sont herbivores, mais certaines peuvent être omnivores. Le krill mange donc des phytoplanctons**, et défèque une quantité significative de carbone (en provenance du phytoplancton qu’il a mangé). Ses excréments denses et plein de carbone coulent dans les abysses (entre 2000 et 4000 m de profondeur à certains endroits) et du carbone y est stocké en masse pendant plusieurs centaines (ou milliers) d’années. On dit donc que le krill contribue à un mécanisme qu’on appelle pompe biologique, car il aide à emprisonner le carbone dans les profondeurs de l’océan et empêche ainsi que le carbone retourne dans l’atmosphère. Les excréments, une fois dans les profondeurs, servent de nourriture à certaines espèces abyssales.  

De très nombreuses espèces se nourrissent de krill. C’est le cas de plusieurs mammifères marins tels les phoques, les orques, les baleines, mais aussi des poissons comme le thon et le saumon, des oiseaux, dont les manchots, et enfin, ils sont aussi consommés par les calmars. Le krill est donc considéré comme le maillon de base de nombreuses chaines alimentaires. Seulement, voilà, le krill va concentrer des polluants toxiques présents dans les océans... comme le mercure et le plomb. Les espèces qui le consomment vont assimiler à leur tour ces polluants dans leur organisme, ce qui fait que, au final, chaque élément d’un réseau trophique va se retrouver avec certaines quantités de plomb et de mercure... On parle alors de bioaccumulation.  

Meganyctiphanes norvegica qui prend la pose

Une espèce clé amenée à disparaitre?

Avec les changements climatiques, particulièrement le réchauffement qui fait fondre la glace, le taux de salinité des océans est réduit ce qui diminue la taille et la quantité de phytoplancton, nourriture principale du krill. Ce qui pourrait entraîner une diminution des populations de krill. Un autre facteur entre en jeu : la surpêche. Riche en oméga-3, anti-inflammatoire et reconnu largement pour ses bénéfices cardiovasculaires, la demande de krill est très importante, plus importante que l’offre. Cette ressource est donc surexploitée. À long terme, cela risque d’engendrer un point de non-retour pour la survie à long terme des Euphausiacés.  

Seulement un « petit » essaim de krill vu des airs...

Tu l’auras compris, le krill est un poids essentiel dans la balance des écosystèmes. Pour les préserver, tu peux commencer par surveiller et limiter sa consommation. Le krill se retrouve sous forme d’huile, en farine dans les aliments ou friandises pour animaux, ou même sous forme de capsule en compléments alimentaire. Pour limiter ta consommation par exemple, tu peux consommer des huiles végétales, consommer des fruits secs, des oléagineux et des graines, ou prendre des compléments alimentaires d’une autre sorte! À toi de jouer.

NOTES

* Les crustacés, comme la daphnie, les crevettes et le cloporte, sont des arthropodes à carapace, au corps formé de segments munis chacun d'une paire d'appendices.

** Le phytoplancton est un organisme microscopique végétal. On pourrait le qualifier de micro algue.

Par Lou, éducatrice-naturaliste

Sources images : Uwe Kils, Marcus Saperaud, Eric Vance (USEPA)

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Question du public
Ruminer les ruminants

Quel est le point commun entre une girafe, un mouton, un kangourou, un orignal et un dromadaire? Ils sont tous capables de ruminer! Mais attention, tous les animaux capables de ruminer ne sont pas pour autant des ruminants!

Petite devinette : outre le fait que ce soient tous des mammifères, quel est le point commun entre une girafe, un mouton, un kangourou, un orignal et un dromadaire? Alors... Alors... Et bien ils sont tous capables de ruminer! Mais attention, tous les animaux capables de ruminer ne sont pas pour autant des ruminants! Quoi?! Scandale! Nous aurait-on menti?! Je t’avoue que moi aussi j’étais un peu perdu. Mais tu vas voir, ce n’est pas très compliqué.

Un wallaby qui rumine

Tout ce qui rumine n’est pas un ruminant

Ruminer désigne l’action d'avaler des végétaux presque sans les mâcher, puis de les conserver un certain temps dans des compartiments associés à l’estomac. Ces petits amas de végétaux ingérés, également appelés bols alimentaires, seront ensuite régurgités pour être mastiqués une nouvelle fois puis réavalés. Ce processus peut être répété jusqu’à 60 fois chez certains animaux! Autant de fois que nécessaire pour que les particules alimentaires atteignent la taille requise pour pouvoir continuer leur parcours le long du système digestif.

Chez les mammifères, cette adaptation est apparue plusieurs fois et de manière indépendante au cours de l’évolution. On appelle cela la convergence évolutive. En effet, la capacité à ruminer a été développée tour à tour chez les marsupiaux (les kangourous), les camélidés (on parle des dromadaires, chameaux, lamas, alpagas, etc.) et les fameux ruminants! Ce dernier groupe comprend les bovidés (donc les vaches, chèvres, moutons, antilopes, gazelles, etc.), les cervidés (nos cerfs, orignaux, caribous et leurs cousins), les girafidés (soit les girafes et les okapis), les antilocapridés (soit les antilocapres a.k.a. les antilopes d’Amérique), les tragulidés (les chevrotains) et les moschidés (les chevrotains porte-musc).  

Un orignal qui s'apprête à ruminer.

Les scientifiques pensent que cet avantage évolutif a été développé car il permet à ces animaux de limiter le temps d'ingestion de leur nourriture. Le fait que la mastication des aliments puisse être différée confère un avantage conséquent à ces herbivores, constamment sous la menace d’un potentiel prédateur. De plus, cette technique leur permet également d’accéder à de la nourriture difficilement assimilable par les autres animaux. On pense ici au fourrage comme la paille, les tiges ou encore les graminées sèches qui possèdent une teneur élevée en fibres et en parois lignifiée, donc plus difficile à digérer.

Mais alors, me diras-tu, quelle est la différence entre ces ruminants et les animaux qui ruminent? On y arrive!

Zoom sur le système digestif

La différence essentielle entre ces trois groupes (les marsupiaux, les camélidés et les ruminants) se fait au niveau de leur système digestif. En effet, la particularité des animaux qui ruminent est de posséder plusieurs estomacs, ou plus précisément, plusieurs chambres ou compartiments dédiés à la digestion des aliments. Les marsupiaux en possèdent deux, les camélidés trois et les ruminants quatre! Voyons comment cela fonctionne.

Si nous prenons l’exemple d’une vache, les quatre chambres présentes dans son appareil digestif sont le rumen (ou panse), le réticulum (ou bonnet), l’omasum (ou feuillet) et l’abomasum (ou caillette). Au niveau de leurs fonctions, le rumen, le réticulum et l’omasum peuvent être considérés comme des pré-estomacs, tandis que l’abomasum serait l’équivalent de notre estomac à nous.  

Le rumen (A), le reticulum (B), l'omasum (C) et l'abomasum (D) d'une vache

Le rumen

La nourriture avalée arrive donc d’abord dans le rumen, qui est directement connecté à l’œsophage. Ce grand compartiment représente à lui seul 90 % du volume des pré-estomacs et avoisine les 150 L chez une vache adulte! Ici, les aliments fermentent, c'est-à-dire que le sucre et l’amidon qu’ils contiennent sont dégradés en fines particules sous l’action des milliards de bactéries, champignons et protozoaires qui habitent le rumen. Ce procédé permet de produire de l’énergie à la fois pour notre vache, mais aussi pour tous les microorganismes qui vivent dans sa panse. Pour la vache, elle prend la forme d’acides gras volatils qui sont directement absorbés dans son sang à travers la paroi du rumen. Ils représentent 70 à 80 % de l’énergie totale ingérée par le ruminant. Pour les microorganismes, l’énergie leur parvient sous forme d’adénosine triphosphate (ou ATP pour les intimes), une molécule chargée de transporter l’énergie vers les cellules. On y reviendra plus en détail dans un autre article.

Mais ce n’est pas tout! Ces microorganismes présents dans le rumen confèrent également aux animaux hôtes le super pouvoir de digérer facilement la cellulose, la molécule présente dans la paroi des cellules végétales, ce que peu d’autres mammifères sont capables de faire. Cette relation entre le ruminant et les microorganismes vivants dans son estomac peut donc être qualifiée de mutualiste, c’est-à-dire qu’elle est mutuellement bénéfique pour tous les individus. D’un côté, le ruminant offre de la nourriture et un environnement parfait pour le développement des microorganismes. En contrepartie, ces derniers lui confèrent la capacité de digérer la cellulose et lui fournissent de l’énergie. Ça donnerait presque envie de pouvoir ruminer tout ça!

Mais le processus de digestion ne s’arrête pas là, ce n’est en fait que le début. Après avoir fermenté dans le rumen, les aliments sont régurgités sous forme de bouillie fermentée, puis longuement mastiqués, imprégnés de salive et ravalés. Tout d’un coup, ça ne donne plus tant envie de ruminer...

Le réticulum

Le réticulum est un compartiment annexe à la panse qui sert à stocker les aliments les plus difficiles à digérer, en agissant un peu comme une passoire. En effet, ces aliments devront être régurgités et mastiqués plusieurs fois afin d’atteindre la taille nécessaire pour pouvoir traverser le réticulum et avancer dans le système digestif.

L’omasum

Après son passage par le rumen et le réticulum, le bol alimentaire qui a maintenant été fermenté et ravalé à plusieurs reprises arrive dans l'omasum. Dans ce troisième pré-estomac, la bouillie est déshydratée. Ainsi, au contact des nombreuses lames parallèles couvertes de muqueuse qui tapissent sa paroi, l’eau, les sels minéraux et une partie des nutriments qui composent la bouillie pourront être absorbés dans le sang.

L’abomasum

L’abomasum, ou estomac véritable, est la destination finale des aliments dans le processus digestif. Il permet à la vache de retirer les derniers nutriments présents dans le bol alimentaire. Ici, la digestion se fait grâce aux enzymes qui y sont sécrétés, comme dans notre propre estomac!

Une fois cette dernière étape du processus digestif complétée, la matière restante non digérée termine sa course dans l’intestin avant d’être rejetée par l’animal. Ce cycle complet de digestion aura pris environ... 3 jours après la première ingestion de l’aliment! Ça fait long à attendre avant de pouvoir aller se baigner...

Les ruminants et les changements climatiques

« Il faut manger moins de viande rouge! » « Manger moins de viande pour sauver le climat! » « L’élevage est source de gaz à effet de serre! » Ce sont des phrases que l’on entend de plus en plus souvent, mais quel peut bien être le lien entre nos beaux ruminants et la fonte de la banquise?

Il faut savoir que les changements climatiques sont causés par une accumulation de gaz à effet de serre (GES) dans notre atmosphère. Ces gaz ont pour effet d’emprisonner la chaleur réémise par la Terre et donc de réchauffer la température moyenne à sa surface. Les trois principaux GES sont le méthane, le dioxyde de carbone et la vapeur d’eau, même s’il en existe de nombreux autres. Dans le cas de nos ruminants, le gaz à effet de serre qui nous intéresse est le méthane et nous allons voir pourquoi.  

À lui seul, ce gaz représente 15 % de nos émissions de GES, dont la moitié est produite par le secteur agricole. Certes, il est émis en plus faible quantité que le dioxyde de carbone, cependant son pouvoir d’emprisonnement de la chaleur est environ 30 fois supérieur!  

L’autre particularité du méthane est qu'il se forme lors de la dégradation de la matière organique dans un environnement anaérobique, c’est-à-dire sans oxygène, comme par exemple dans un marais ou... dans l’estomac d’un ruminant! Et oui, tu comprends maintenant, les ruminants et principalement les animaux d’élevage comme les vaches, sont une source conséquente de méthane! En effet, le processus de fermentation qui a lieu dans le rumen se fait dans des conditions anaérobiques et produit donc énormément de méthane. Ce méthane est ensuite expulsé sous forme de rots lors de la régurgitation des aliments, mais aussi sous forme de flatulences. On le retrouve également en plus petite quantité dans ses excréments.

Les ruminants de parfaits boucs émissaires

Ruminants... boucs émissaires... Tu la comprends? Pas mal hein?!

Cependant, il ne faut pas rejeter toute la faute de nos émissions sur nos ruminants! Même si le méthane produit par les animaux d’élevage est un processus naturel qui se déroule lors de leur digestion, il n’en reste pas moins considéré comme une source humaine de GES au même titre que les voitures ou les avions. En effet, c'est notre consommation de viande et de produits laitiers qui impacte directement le nombre de ruminants que nous décidons d’élever. Donc, plus nous en consommons, plus nos émissions augmentent.  

Un p'tit rot de ruminant!

Il est bon de noter que des groupes de chercheurs étudient actuellement des moyens pour réduire l’impact des ruminants en termes de GES, sans pour autant avoir à baisser notre consommation. Certains ont d’ailleurs pu établir un lien entre le type de nourriture ingéré par les ruminants et leurs émissions de méthane. Par exemple, la digestion d’aliments plus riches en fibres comme le foin produirait plus de méthane que la digestion du maïs. D’autres scientifiques ont même constaté que l’ajout d’algues à l’alimentation des vaches permettrait de réduire leurs émissions de GES de moitié... Encore faut-il que les vaches acceptent de manger des algues!  

Mais bon, en attendant une solution miracle qui ne viendra peut-être jamais, manger une portion de viande en moins par semaine est un petit sacrifice à la portée de tous, qui pourrait avoir des conséquences très bénéfiques!

Par Gabriel, éducateur-naturaliste

Sources images : Pixabay, Pixabay, GUEPE (tiré de Pearson Scott Foresman), Pixabay, Pixabay

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Question du public
L'élevage expliqué

C’est en partie basé sur l’observation des animaux d’élevage et les effets de la sélection artificielle humaine que Darwin a construit son plus grand ouvrage : la théorie de l’évolution! Mais, c'est quoi l'élevage?

As-tu déjà eu l’occasion d’observer des mouflons lors de randonnées dans les Rocheuses ou dans un documentaire nature? Ces ovins qui se déplacent agilement sur les flancs de montagnes d’Amérique du Nord, d’Europe et d’Asie* paraissent bien différents du mouton duquel on récolte notre laine. Pourtant, le mouton actuel et les mouflons ont les mêmes ancêtres!

Les animaux d’élevage, autant que les animaux domestiqués comme les chiens ou les chats, ont connu de grands changements morphologiques et comportementaux depuis que les humains ont commencé à les domestiquer. C’est d’ailleurs en partie basé sur l’observation des animaux d’élevage et les effets de la sélection artificielle humaine que Darwin a construit son plus grand ouvrage : la théorie de l’évolution!

Cependant, plutôt que de lire le premier chapitre de L’origine des espèces, on te propose ici une lecture un point plus courte pour comprendre l’élevage et l’évolution des animaux qui, on l’espère sera bien moins complexe**!

 

C’est quoi l’élevage?

Commençons par le début, car l’élevage ce n’est pas forcément un concept clair pour tout le monde. Dans le langage commun, on peut autant utiliser le mot « élever » pour un chien, une poule ou un enfant, mais ça ne veut pas dire qu’on fait de l’élevage d’enfants.  

L’élevage dans ce texte réfère à l’ensemble des activités qui assurent l’entretien et la multiplication d’animaux utiles pour les humains. Ces activités regroupent les techniques permettant de les faire naître, d’assurer leur développement, leur entretien et leur reproduction. Ces animaux peuvent être domestiques, mais aussi sauvages***.  

L’utilité des animaux d’élevage peut être diverse : pour obtenir un produit alimentaire, comme la viande ou le lait, ou non alimentaire, comme la laine, le cuir, le duvet ou encore la cire d’abeille; pour une aide au travail, comme les animaux utilisés pour la traction et les transports, mais aussi les chiens d’aide, de sécurité ou de chasse; ou pour l’animal lui-même, comme des animaux de repeuplement d’espèce (conservation ou chasse) mais aussi les animaux de compagnie. Hé oui, ton chien, ton chat ou ton poisson rouge, c’est aussi un animal d’élevage!

Un chien d'élevage qui veille sur un élevage de moutons.

Parmi les élevages les plus originaux, on retrouve notamment l’élevage de plusieurs espèces d’insectes. On connait bien les ruches qui constituent une forme d’élevage afin d’assurer la pollinisation des plantes sauvages et cultivées, mais bien d’autres insectes sont désormais élevés. C’est le cas des coccinelles qui sont ensuite relâchées dans les champs pour prédater des insectes ravageurs des cultures, mais aussi des grillons élevés pour l’alimentation ou encore les vers que tu vas élever dans ta boite de vermicompost!

 

Une pratique qui fait évoluer  

Lorsqu’on pratique l’élevage pour des besoins humains on va forcément sélectionner les animaux pour des traits particuliers. Cette sélection artificielle entraîne une évolution des espèces ainsi manipulées, et les changements physiques peuvent apparaître très rapidement. Ainsi, si l’on compare des animaux d’élevage actuels issus de sélection avec leurs ancêtres sauvages, il y a parfois de très grandes différences.  

Au début de l’article, je t’ai parlé du mouton et du mouflon. Ces deux animaux sont assez similaires pour qu’on devine qu’ils font partie du même genre (Ovis), cependant la pression de sélection exercée par l’élevage humain les a assez différenciés pour qu’on soit désormais capable de les reconnaître facilement. La plupart des races de moutons ne présentent plus une fourrure à poil court, mais une épaisse toison bouclée. Autre différence plutôt étonnante, le mouton domestique a une queue plus longue que celle de ses cousins sauvages! On mourra moins bête!

L’évolution des chevaux vers les représentants actuels présente également son lot de changements morphologiques. Si le cheval domestique descendrait du Tarpan, espèce éteinte dont on ne retrouve que des illustrations et quelques photos, on peut noter son évolution en le comparant au cheval de Przewalski. Ce petit cheval mongol**** a déjà été domestiqué par l’espèce humaine, mais retourné à l’état sauvage peu après sa domestication il y 5 500 ans, il représente aujourd’hui la plus ancienne population de cheval sauvage, et rappelle de beaucoup les chevaux dessinés sur les peintures rupestres. Comme l’ancêtre du cheval domestique, il mesure 1,30 m en moyenne, présente une crinière courte et une robe rousse/beige qui lui permet d’être camouflé dans les grandes steppes mongoles. Bien que plusieurs races de chevaux domestiques aient également une petite taille, et qu’on retrouve une grande diversité de chevaux domestiques différents, l’élevage a modifié de nombreux traits tels que la couleur de la robe, la longueur de la crinière, le squelette et la minceur de la tête, de l’encolure et des pattes.

Des chevaux de Przewalski, camouflés dans les steppes mongoles.

Un trait intéressant que l’on retrouve chez de nombreuses espèces animales élevées et domestiquées est la néoténie. Ce terme scientifique impressionnant veut simplement dire que des caractères juvéniles sont conservés à l’âge adulte. On retrouve de la néoténie chez les moutons, mais aussi chez les chiens et les chats. Un chien adulte continuera à aboyer et remuer la queue alors qu’un loup perd ces comportements dès qu’il devient adulte. De son côté, un vieux chat joue et ronronne encore alors qu’un chat sauvage adulte ne le fera pas.  

Bien sûr, les chiens ou chats domestiques présentent de nombreux autres traits attestant de leur évolution depuis le début de leur domestication. On pourrait passer des heures à les lister, mais on va gagner du temps et plutôt te laisser sur ce meme qui résume à la perfection tout ce qu’on vient de t’apprendre :

Years of evolution... ruined! |  MAYBE I'LL GET SOME FOOD AT THAT CAMPFIRE; WHAT'S THE WORST THAT COULD HAPPEN ? 10.000 YEARS LATER | image tagged in wolf,pug,hat,evolution | made w/ Imgflip meme maker
« Je trouverai peut-être de la nourriture autour de ce feu de camp. Que peut-il arriver de terrible?... » « 10 000 ans plus tard… »

NOTES

* Les scientifiques ne s’accordent pas toutes et tous sur le nombre exact d’espèces du genre Ovis, mais il existerait six espèces sauvages dans le monde, aka les mouflons, et une espèce seule domestique : le mouton! Au Canada, on peut observer deux espèces : le mouflon canadien et le mouflon de Dall.

** Si tu souhaites cependant découvrir les réflexions de Darwin et son style d’écriture, le chapitre de L’origine des espèces qui traite de l’élevage s’intitule « De la variation des espèces à l’état domestique ». On te souhaite bonne chance!

*** Il existe, par exemple, des élevages d’animaux sauvages, tels que les visons pour obtenir de la fourrure, ou encore des élevages d’animaux pour la chasse et la pêche. Les parcs zoologiques élèvent également des espèces sauvages menacées d’extinction afin d’assurer leur sauvegarde.

**** Tu peux aller observer ce cheval sans aller aussi loin que la Mongolie. Des populations de cette espèce évoluent en semi-liberté en France et en Belgique!

Par Julie, chargée de projet

Sources images : Pixabay, Sl-Ziga, Ancalagon, imgflip

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