Le polatouche, l'écureuil planant

6/12/2023
Aventures d'un.e naturaliste

« C’était le milieu de février. Le soleil se reflétait sur la neige fraîchement tombée la veille et le bleu du ciel brillait au travers des branches des arbres. On s’est arrêtés quelques instants pour faire une pause, resserrer les ganses de nos raquettes et boire une gorgée d’eau. Un d’entre nous s’appuie sur un vieil arbre creux pour enlever un bout de glace de sur ses crampons. Le chicot tenant à peine debout s’est incliné sous sa main et un bruit venant du tronc s’est fait entendre. Aucun d’entre nous n’aurait pu imaginer ce qui allait en sortir… »

Vidéo exclusif du polatouche en question.

On les appelle communément des écureuils volants. Au Québec, nous en avons deux espèces : le petit et le grand polatouche. Ce dernier se cache dans les forêts mixtes et de conifères tandis qu’on trouve le petit dans les forêts de feuillus, sur une zone restreinte du sud de la province. D’ailleurs, il est susceptible d'être désigné espèce menacée ou vulnérable au Québec parce que son habitat est constamment modifié ou détruit par les activités humaines.  

Les deux polatouches se ressemblent au premier coup d’œil (avec ses 30 cm de longueur moyenne, le grand est à peine plus grand que le petit, qui fait environ 23 cm de long)*. Toutefois, le ventre est gris chez le grand polatouche et blanc chez le petit, ce qui permet à un expert de les distinguer sous la lumière du jour**, et leurs queues n’ont pas non plus la même forme. Ils font partie de la même famille que le très répandu écureuil gris. Tous les trois sont arboricoles et ont une alimentation principalement herbivore (quoique les polatouches mangent aussi des insectes et des œufs). Par contre, à la différence des autres écureuils, nos polatouches possèdent un patagium…

Un petit polatouche trop mignon

« À nous quatre, nous n’avions pas loin de 65 ans d’expérience en plein air et en sciences naturelles (à mentionner que parmi nous se trouvait un spécialiste du piégeage au pays) et aucun d’entre nous n’avait jamais vu un polatouche en chair et en os, encore moins en plein jour et encore moins en plein vol. »

 

On les appelle volants, parce que les polatouches ont une membrane entre leurs bras et leurs jambes qui leur permet de planer entre les arbres. C’est ça leur patagium***. Il leur suffit de se propulser en sautant, d’étirer leurs membres déployant ainsi leur patagium et l’air fait le reste. C’est tout un spectacle de voltige!

Les polatouches, bien qu'actifs toute l’année, sont des animaux extrêmement rares à observer. D’abord, ils sont nocturnes. Leurs grands yeux leur permettent de se déplacer sous la protection de la nuit et ainsi d’éviter les chats et les hiboux, qui sont leurs principaux prédateurs. Ensuite, les polatouches sont discrets et très peu vocaux (contrairement aux autres écureuils…). Il est donc assez difficile, voire impossible, de les repérer quand ils se cachent dans leur nid dans les cavités des arbres.  

« Je raconte cette observation comme une des plus incroyables de ma vie, et je vais sans doute continuer de le faire pour très longtemps. C’était une chance unique, un moment magique, que de voir cet animal mystérieux et rare. Qui l’aurait cru! Pour moi, c’était comme trouver un trèfle à quatre feuilles, voir éclore la fleur d’un arum titan, déterrer un fossile d’ankylosaure****… »

Un grand polatouche et son festin. (C'est un ornithologue amateur qui a découvert la fluorescence** des polatouches alors qu'au petit matin un se nourrissait dans une mangeoire et qu'il l'a observé à l'aide d'une lampe UV.)

NOTES

* C’est environ la grosseur d’un écureuil roux.  

** On a récemment découvert que, comme les ornithorynques et les opossums, les polatouches sont des mammifères fluorescents. (Ce trait est un bon exemple d’évolution convergente, car ces trois espèces ne sont aucunement apparentées.) La fluorescence est l’apparition de couleurs fluo sous des rayons ultraviolets, alors que sous une lumière naturelle, les couleurs semblent normales. Ce sont des molécules spécialisées qui absorbent l’énergie lumineuse pour la restituer sous forme de lumière fluorescente. On trouve ces molécules entre autres dans les poils, les écailles ou les plumes des animaux. Chez le polatouche, c’est son ventre et sa queue qui apparaissent roses sous les rayons ultraviolets. Les raisons de ce phénomène ne sont pas encore expliquées, mais selon Julia Morarin, diplômée d’une maîtrise en archéobiologie à l’Université de Montpellier, « il y a certains chercheurs qui expliquent que la fluorescence serait un moyen de communication ou un moyen de se reconnaître entre individus d'une même espèce. »

*** C’est aussi comme ça qu’on appelle la membrane qui forme les ailes des chauves-souris, le seul mammifère qui peut véritablement voler. Les polatouches devraient plutôt être appelés des écureuils planants, puisque leur « vol » est passif.  

**** À bien y penser, je changerais peut-être d’avis après avoir trouvé un fossile d’ankylosaure

Par Anne-Frédérique, chargée de conception

Sources images : Paysages, Stephen Durrenberger, Naoki Takebayashi

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